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Journée mondiale de la santé sexuelle : que dit la science ?

Social & SociétalSanté publique
28 septembre 2025, 22:38
Journée mondiale de la santé sexuelle : que dit la science ?

Chaque 4 septembre, la planète célèbre la Journée mondiale de la santé sexuelle, portée par l’Association mondiale pour la santé sexuelle (WAS). Derrière les slogans, un fait simple : la santé sexuelle est un droit humain, un enjeu de justice sociale et un pilier de sociétés durables.

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), plus d’un million d’infections sexuellement transmissibles curables surviennent chaque jour à l’échelle mondiale. En 2020, on estime 374 millions de nouveaux cas (chlamydia, gonorrhée, syphilis, trichomonase). Beaucoup passent inaperçus.

D’après la science, la transmission n’est pas symétrique, en effet, lors d’un rapport vaginal sans préservatif, le risque de transmission du VIH de l’homme vers la femme est environ deux fois plus élevé que dans l’autre sens. Ces ordres de grandeur sont établis par la méta-analyse «Heterosexual risk of HIV-1 infection per sexual act » (The Lancet Infectious Diseases) et confirmés par «Estimating per-act HIV transmission risk» (AIDS). Autrement dit, à situation identique, un homme vivant avec le VIH a plus de probabilité de contaminer sa partenaire qu’une femme à son partenaire.

Point clé de prévention : d’après le National Institute of Allergy and Infectious Diseases(NIAID), lorsqu’une personne vivant avec le VIH suit correctement son traitement et que la charge virale est indétectable, la transmission sexuelle est nulle.

Ce que cela implique au Maroc

Au Maroc, l’épidémie de VIH reste faible dans la population générale, mais concentrée dans certains réseaux. Surtout, les analyses de modes de transmission montrent un schéma constant, beaucoup de contaminations féminines surviennent au sein du couple. D’après l’article « The distribution of new HIV infections by mode of exposure in Morocco» (Sexually Transmitted Infections / BMJ), fondé sur des travaux du Ministère de la Santé et de la Protection Sociale (MSPS) et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), la majorité des femmes infectées le sont par leur époux ou partenaire. Autrement dit, impliquer les hommes dans la prévention et le dépistage n’est pas accessoire, c’est central.

Conséquences sanitaires : non traitées, certaines IST (chlamydia, gonorrhée) évoluent vers des maladies inflammatoires pelviennes, avec infertilité, grossesses extra-utérines et douleurs chroniques. C’est un fardeau disproportionné pour les femmes. Côté prévention, le MSPS et des associations comme l’Association de Lutte Contre le Sida (ALCS) renforcent le dépistage, généralisent l’accès à la prophylaxie pré-exposition (PrEP) dans les situations à risque, et soutiennent la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV) au Programme national de vaccination (PNV) pour prévenir le cancer du col de l’utérus (vaccin et dépistage par test HPV/frottis).

Que faire maintenant (mesures concrètes)

• Dépister et traiter le couple. D’après l’essai randomisé «Male-Partner Treatment to Prevent Recurrence of Bacterial Vaginosis» (New England Journal of Medicine), traiter aussi le partenaire masculin réduit nettement les récidives d’une infection vaginale fréquente. Message opérationnel : soigner les deux partenaires lorsque c’est indiqué.

Revenir aux bases. Préservatifs, dépistage régulier en cas de partenaires multiples, PrEP dans les couples sérodifférents. Ces recommandations sont constantes chez l’OMS et l’ONUSIDA.

HPV : vacciner et dépister. Poursuivre la vaccination des filles (et, selon stratégies, rattrapage/extension), et maintenir le dépistage du col par test HPV ou frottis selon l’âge et les protocoles nationaux.

Parler aux hommes. Adapter les horaires, les lieux et le langage des actions de prévention pour attirer les conjoints masculins (entreprises, centres de santé, campagnes ciblées). Quand les hommes se font dépister et traiter, les femmes sont mieux protégées.

La Journée mondiale de la santé sexuelle n’est pas qu’un rendez-vous symbolique. Les faits sont clairs, le poids des IST est massif, les femmes paient plus souvent la facture, et beaucoup d’infections féminines surviennent dans le couple. La solution est connue : information simple, dépistage des deux partenaires, préservatifs, PrEP quand nécessaire, vaccination et dépistage HPV, et prise en charge du couple. C’est du bon sens de santé publique, et c’est aussi du développement durable : moins d’inégalités, moins de maladies évitables, plus de dignité.

Sources

• Organisation mondiale de la Santé (OMS) — Sexually transmitted infections (STIs): Key facts (fiche d’actualité).

• The Lancet Infectious Diseases — Heterosexual risk of HIV-1 infection per sexual act: systematic review and meta-analysis of observational studies (Boily et al.).

• AIDS (journal) — Estimating per-act HIV transmission risk: a systematic review (Patel et al.).

• National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) — Undetectable = Untransmittable (U=U).

• Sexually Transmitted Infections / BMJ — The distribution of new HIV infections by mode of exposure in Morocco (Mumtaz et al.), basé sur MSPS et ONUSIDA.

• New England Journal of Medicine — Male-Partner Treatment to Prevent Recurrence of Bacterial Vaginosis (Vodstrcil et al.).

Rédigé par : WB

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